LE FONCIER : AUTOPSIE DU PRIX ET DE L’ÉCHANGE

Le rejet unanime de la spéculation et des spéculateurs fonciers au Maroc exprime un ancrage remarquable, dans le discours, de l’idéologie du travail selon laquelle toute rémunération doit passer par un effort productif. Ce sujet est tout à la fois explosif, grave et passionnel parce qu’il renvoie à la question du droit à l’accès au sol, support du logement. Pourtant, ou plus exactement à cause de cela, la condamnation de la spéculation et des spéculateurs, pour légitime qu’elle soit, ne devrait pas, comme elle le fait trop souvent, parce qu’elle est une ‘réponse simple à une question complexe, se substituer à la recherche de la compréhension du phénomène dans sa globalité. En effet, cette focalisation sur le rôle des propriétaires fonciers dans la hausse des prix surdétermine leur pouvoir, ignorant ainsi les autres pièces du puzzle, comme la torche braquée sur un espace dessine un rond de lumière dont la luminosité éclaire certes l’objet ainsi délimité mais, ce faisant, renforce les zones d’ombre avoisinantes. Cet ouvrage est une investigation des déterminants multiples du foncier urbain traité ici comme « un fait social total ». L’analyse des variables explicatives des prix fonciers (variables globales et macro-localisées) et des acteurs (Etat, propriétaires fonciers, consommateurs) démontre que la formation du prix n’est jamais univoque.